Le chemin vers la haute tension, pour un photovoltaïque plus performant et durable, nécessite des évolutions technologiques sur les panneaux solaires. Le CEA est précurseur et montre des résultats et équipements uniques dans ce domaine.

Le futur du photovoltaïque à haute tension ?
Le photovoltaïque sera la première source mondiale d’électricité avant 2050 (source : IEA).
Pourtant, même les plus grandes centrales solaires de plusieurs gigawatts fonctionnent aujourd’hui en basse tension, ce qui limite leur puissance, complique leur conception et augmente les coûts de câblage. Parallèlement, l’intégration du photovoltaïque sur des infrastructures linéaires existantes (routes, voies ferrées, canaux) gagne en intérêt. Mais ces configurations augmentent la puissance à transporter, et donc les courants en jeu. Le passage de 1,500 Vdc usuels à 3,000 Vdc réduit de 50% les pertes et permet une économie de 47% en cuivre et aluminium pour des systèmes décentralisés (1).
Face à ces enjeux, une évolution technologique vers une connexion directe à la haute tension s’impose pour un photovoltaïque plus performant et durable.
Le CEA est un pionnier pour cette thématique, avec de premiers travaux démarrés en 2014 dans le cadre d’un appel d’offre de la CRE, visant à fournir un design de panneaux et de systèmes photovoltaïques pouvant fonctionner à 3,000 Vdc. Un démonstrateur a été d’ailleurs mis en œuvre sur la toiture de l’INES.
Et si la filière a montré un intérêt dès 2016, avec plusieurs publications de centres de recherche ou d’industriels, force est de constater que le marché n’était pas prêt. La priorité est alors d’installer en volume des centrales utilisant des technologies éprouvées.
Aujourd’hui, la communauté photovoltaïque semble atteindre un consensus et vouloir franchir le pas vers la haute tension. Cela se traduit par une norme (IEC-63543) en préparation pour adresser les panneaux et systèmes des tensions jusqu’à 3,000 Vdc.
Cela se traduit également par des projets de recherche et d’innovation supportés par la Commission Européenne et des industriels de premier plan dont Nexans, Schneider Electric, la SNCF, la CNR.
Depuis plus de 10 ans, le CEA a conforté sa position de précurseur et poursuit ses travaux avec des projets comme Tigon, Raccor-D et Medium.
Il s’agit d’optimiser le design de panneaux pour un fonctionnement à 3,000 Vdc mais aussi de préparer les tensions supérieures 6,000 Vdc et 9,000 Vdc, tension considérée par la SNCF comme optimale dans le cadre de la rénovation des lignes du réseau ferré régional ou secondaire.
Dans le cadre du projet Raccor-D avec la SNCF, le CEA a pu démontrer une architecture stabilisée de panneaux photovoltaïques fonctionnant à 3000Vdc.
Avec l’augmentation des tensions appliquées, les modules sont exposés à des risques accrus de dégradation liées au phénomène PID (Potential Induced Degradation). La sélection des éléments constituant les panneaux comme le verre, les encapsulants, les cellules les plus adaptés nécessite des caractérisations avancées et la mise en place de moyens d’essais spécifiques.

A titre d’exemple des tests PID menés à 3,000 Vdc permettent d’approfondir la compréhension des mécanismes de déplacement des charges sous l’effet du champ électrique, ouvrant ainsi la voie à des systèmes photovoltaïques plus robustes et durables.
Un travail amont sur la compréhension des mécanismes de dégradation propres à ces niveaux de tension est nécessaire, ainsi que la mise en place de moyens de caractérisation (développés au CEA) en laboratoire et en extérieur.
Onze références de panneaux photovoltaïques, neuf issus du commerce et deux prototypes développés par le CEA, ont été soumis à une séquence de tests incluant une stabilisation sous éclairement, une séquence d’essais PID sous ±3,000 Vdc (-3,000 Vdc puis +3,000 Vdc) et une séquence d’essais PID sous ±6,000 Vdc (-6,000 Vdc puis +6,000 Vdc).
A la fin de la séquence de tests, les panneaux de technologies hétérojonction, et ceux conçus spécifiquement par le CEA pour la haute tension utilisant une architecture et des matériaux spécifiquement sélectionnés, montrent des pertes de puissances inférieures à -2 %, des images d’électroluminescences stables, et présentent les plus faibles sensibilités au PID.
A noter, toutes les références hétérojonction ne se sont pas comportées de la même manière.
Les autres références présentent soit des pertes importantes soit des signatures de dégradations typiques des effets PID.
Les travaux de nos laboratoires se poursuivent pour adresser 6,000 et 9,000 Vdc avec des panneaux tenants à la fois ces hautes tensions et la norme IEC standard. Ces travaux se basent sur la simulation qui aide à l’optimisation des designs afin de conserver des dimensions de panneaux standard.
Quand on parle haute tension, on s’intéresse aussi à la conversion. Voir aussi ce qui se passe sur cette thématique dans les projets TIGON (lien publication du 01/04/2025) et DC-Power (lien article du 8/02/2024).
- Upcoming System Technology in Medium Voltage for High-Power Charging and Large-Scale PV-Plants, Dirk Kranzer, Henrike Köhler, Andreas Hensel Fraunhofer ISE